6 décembre 2007
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La roue de secours de Bush en Irak est un gang de brutes mercenaires sans scrupules payés à prix d'or et entrainés à tuer avant de discuter.Pour suppléer aux insuffisances d'une armée régulière débordée de toutes parts en Irak, Bush a fait appel à des milices privées pour protéger les civils travaillant pour l'occupant américain. Ces sous-traitants pour la sécurité sont assurés d'une impunité totale. Deux jours avant son départ de Bagdad, l'administrateur de l'Autorité provisoire de la coalition, L. Paul Bremer III, a signé un ordre général immunisant tous les américains "pour s'assurer, comme l'a dit un de ses adjoints, que tous nos collaborateurs militaires ou civils échappent à la loi irakienne." Ces 30 000 gardiens privés de l'ordre US en territoire occupé échappent aussi aux tribunaux américains car ils ne dépendent pas du ministère de la Défense, qui pourrait se saisir de leurs bavures dans le cadre de la loi de 2000 sur la juridiction militaire extraterritoriale (deja peu invoquée), mais du ministère des Affaires étrangères qui n'a pas de législation à leur sujet. Le résultat, comme le dit Michael Hirsh, est un "univers où un homme peut tuer des femmes et des enfants à sa guise en sachant qu'il ne sera jamais poursuivi. Un endroit dont toute moralité est exclue et où le meurtre arbitraire est la loi."
La sinistre compagnie Blackwater
La principale de ces toutes-puissantes milices privées s'appelle Blackwater. Selon le député démocrate Elijah Cummings, "elle semble avoir développé une culture de tirer et tuer d'abord, puis de poser des questions". Les paramilitaires peuvent commettre des homicides à leur gré. Et selon de nombreux témoins irakiens, ils le font souvent.
Au point que la talentueuse chroniqueuse du New York Times, Maureen Dowd, évoque Bush en citant Nietzche à son propos : "Celui qui combat avec des monstres doit se garder de ne pas devenir un monstre lui-même."
La plupart des bavures de ces desperados sont passées sous silence. De temps en temps, une affaire trop facheuse a un écho dans les médias.
Comme le cas d'un garde de Blackwater qui s'est enivré lors d'une réception de réveillon à Noel l'an dernier, écrit Michael Hirsh, et qui s'est vanté auprès de ses amis de vouloir tuer quelqu'un. Selon des responsables à la fois irakiens et américains, il est sorti en titubant et s'est dirigé vers le secteur de la "petite Venise", un joli endroit avec des canaux où vivent des responsables irakiens. Il s'est mis à discuter avec un garde irakien, puis l'a abattu d'une balle dans la poitrine et de trois balles dans le dos.
Le lendemain Blackwater l'a mis sur un avion et l'a sorti du pays.
En fait, l'affaire a fait du bruit parce que le garde était chargé de la sécurité du vice-président Adil Abdul Mahdi. Le chargé d'affaires du Département d'Etat a suggéré une compensation de 250 000 dollars pour sa famille, mais le service de la sécurité diplomatique du même Département d'Etat a déclaré que c'était beaucoup trop parce que ça pousserait les irakiens à se faire tuer. Le meurtrier a tout de même été renvoyé, a du régler son voyage de retour et s'est vu privé de 14 697 dollars de bonus, un peu moins que ce qui a été en fin de compte payé à la famille de l'assassiné.
Un massacre gratuit
Depuis cette affaire, une autre a fait scandale.
Le 16 septembre dernier, une balle perdue frappe un homme qui conduisait sa mère rejoindre son père, un médecin à l'hopital. Le mort s'affaise sur le volant et la voiture continue à rouler en direction d'un convoi de Blackwater. Les hommes du convoi ouvrent un feu d'enfer, tuent 17 personnes et en blessent 24 autres. Personne ne leur avait tiré dessus et aucune des victimes n'était armée. Selon Newsweek, "les hommes du convoi ont fait feu de façon folle, au hasard, et sans aucune raison". Malgrè la déclaration de Blackwater que "ses professionnels avaient héroiquement défendu des vies américaines dans une zone de guerre", Bush a du avouer dans une conférence de presse que "de toute évidence, des civils avaient perdu la vie dans l'incident."
La connivence de la clique Bush
Cette fois, les médias ont réagi. D'autant plus que l'armée des cow-boys de Blackwater est grassement rémunérée et que les liens de sa direction avec Bush sont choquants.
Erik Prince, le président à cheveux ras de Blackwater, agé de 38 ans, est un ancien membre d'un corps d'élite de la marine, d'une famille aisée du Michigan. Sa soeur, Betsy DeVos a été une pionnière de Bush, récoltant 100 000 dolars pour le tandem Bush-Cheney en 2004, et lui-même a fait don aux républicains de plus de 225 000 dollars. Le mari de sa soeur, Richard DeVos jr, a été le candidat républicain pour le poste de gouverneur du Michigan en 2006. Blackwater a bénéficié d'un milliard de dollars de contrats fédéraux, y compris un contrat sans appel d'offres avec le Département d'Etat valant des centaines de milliers de dollars. Une enquête du Congrès a découvert que la compagnie faisait payer au gouvernement 1 222 dollars par jour à chaque mercenaire, plus de 6 fois le salaire d'un sldat équivalent.
Comme le dit Maureen Dowd : "On avait le complexe militaro-industriel, on a maintenant le complexe mercenaro-évangéliste".
Des exactions arbitraires
"Toute personne qui a été en Irak (comme moi), écrit Michael Hirsh, sait que la règle non-dite sur le terrain en Irak, au cours des quatre dernières années de tentatives de Bush de mater l'insurrection, est que pratiquement tous les mâles irakiens sont coupables avant d'être prouvés innocents. Les arrestations, les passages à tabac et parfois les meurtres, qui sont le fait des compagnies de sécurité et même des unités militaires, sont arbitraires, et les irakiens n'ont aucune possibilité de recours à la justice. Imaginez la sensation de rage impuissante qui résulte de ce genre de traitement. Appliquez-le pendant plusieurs années, et vous avez une population furieuse et traumatisée. Et un pays incontrolable."
Une affreuse absurdité
De plus, on a l'affreuse absurdité de diplomates US s'efforçant de se faire des alliés parmi les irakiens et de construire une société civile - de "gagner le champ de bataille de la mentalité", a dit le général Douglas Stone au Washington Post - en s'entourant de gardes qui opèrent dans un univers amoral et qui sont hais par la population. Blackwater est vu par les irakiens comme l'image d'une cancéreuse d'occupation.
Rappelez-vous la scène au début du film "Braveheart" quand le méchant lord anglais réclame le droit de cuissage - le droit de déflorer la femme de Mel Gibson - au détriment des écossais impuissants. Eh bien, c'est le genre de réalité moyennâgeuse dans laquelle vivent les irakiens aujourd'hui. C'est le "modèle" que George W. Bush va léguer au monde."
Louis Magnin
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